Journal du 03.VIII.2024 : HORTVS ADONIDIS

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(Journal du 03.VIII.2024) « [Q]ue faisons-nous autre chose, lorsque nous flattons notre corps, que d’accroître la proie de la mort, lui enrichir son butin, lui engraisser sa victime ? » Je découvre en Bossuet, bien tard il est vrai, mon écrivain. « [I]l n’y aura plus sur la terre aucun vestige de ce que nous sommes. ‘‘La chair changera de nature, le corps prendra un autre nom ; même celui de cadavre, dit Tertullien, ne lui demeurera pas longtemps ; il deviendra un je ne sais quoi, qui n’a point de nom dans aucune langue’’ ; tant il est vrai que tout meurt en nos corps, jusqu’à ces termes funèbres par lesquels on exprimait nos malheureux restes* ». Si je l’avais connu lorsque j’étais lycéen et que la pensée de la mort m’occupait tant l’esprit, sans doute l’aurais-je beaucoup cité dans mes compositions de philosophie. Seulement, je ne le rencontre qu’aujourd’hui, ayant si peu lu, et perdu tellement de temps, pas même à vivre. Mais je n’en suis pas malheureux. Je sais déjà que je passerai en sa compagnie des heures heureuses, et qui me seront profitables, puisqu’il m’apprend à écrire en même temps qu’à mourir. Et ces mots que je trouve en ligne, extraits de Langue morte. Bossuet, de Jean-Michel Delacomptée, qu’il faut que je me procure, ne font qu’ajouter à mon enthousiasme : « On n’est pas obligé de partager sa foi, encore moins sa doctrine. Mais l’élévation de ses ouvrages, dès qu’on y pénètre, touche l’athée fatigué de la trivialité des temps. La voûte moderne est basse. Le règne des objets chasse l’esprit. L’ennui s’enfuit, on se divertit. Tout lasse. Bossuet savait quel ennui nous appesantit quand les jours s’étirent sans rien qui les relève. Et moi qui ne crois pas au Ciel, qui m’incline devant les croyants mais qui me représente mal ce qu’on croit quand on croit, qui respire à le lire, j’en éprouve comme une gratitude. » Je ne suis pas encore bien vieux, et pourtant, que je suis fatigué, déjà ! De mon athéisme ! Et de ce monde, combien ! Mais lisant ces pages, que je me sens rajeuni ! Réveillé par un beau matin !

 

* Bossuet, Oraisons funèbres, « Oraison funèbre du père Bourgoing », Garnier, coll. « Classiques Garnier », 1961, p. 59-60.

 

03.VIII.2024

03/08/2024, 19:08 | Lien permanent | Commentaires (0)

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