Journal du 18.VIII.2024 : HORTVS ADONIDIS

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(Journal du 18.VIII.2024) Comme il fait doux, je fais ma mise en page et mes relectures du Testament d’Attis les fenêtres ouvertes sur la rue, d’où vient à mes oreilles le son de conversations en langue sabéenne. Il y a plusieurs années déjà que des Sabéens semblent avoir acheté la grosse maison qui se trouve en face de la mienne. D’ordinaire, ils sont plutôt discrets, sauf quand leurs fenêtres sont ouvertes. Seulement, depuis quelques mois, ils ont été rejoints par deux ou trois jeunes, sabéens eux aussi, qui semblent être leurs locataires. Mais ceux-là sont beaucoup plus pénibles. Ils semblent vivre dans la rue, probablement à la mode de chez eux. Ils viennent y téléphoner, y deviser entre eux, fumer des cigarettes, dont l’odeur vient jusqu’à mes narines, bricoler les moteurs de leurs véhicules à deux ou quatre roues, se faire des passes de ballon quand ils sont d’humeur sportive. Ils n’ont aucune agressivité (ce n’est pas du tout la même canaille que dans les cités, du moins me semble-t-il, mais il est vrai que je ne suis pas un expert, ne la fréquentant guère) ; on ne pourrait pas même leur reprocher de crier, c’est à peine s’ils parlent fort, sauf quand ils sont au téléphone, je me demande pourquoi. Mais le rappel quasi permanent de leur présence étrangère sous mes fenêtres me désole. Psaltérion, que je soupçonne d’être raciste, se hérisse et grogne dès qu’ils lui paraissent trop s’agiter dans la rue qui, de son point de vue très canin, est sa rue. Mais je me demande si elle ne finit pas par s’habituer à eux, la pauvre bête. Si j’avais du pouvoir, je les renverrais chez eux. Si j’avais de l’argent, je quitterais cette rue. Mais pour aller où ? Quelle rue n’est pas menacée ? La mienne est loin d’être la plus populeuse de la ville. Je ne puis rien faire d’autre que subir la Grande Antallage, et c’est en entendant mes Sabéens se râcler la gorge et parler de je ne sais quoi que je relis ces pauvres vers :

 

          Il n’est plus désormais pour ma langue de havre :
          Tous les mots que j’entends me blessent et me navrent…
          Il n’est pas une oreille, il n’est pas un matin
          Où s’entend mon parler qu’on croirait un latin,
          Aussi vieux que celui qui, du mont Janicule
          À la place du for, au pied du Palatin,
          Fut du peuple romain l’antique véhicule,
          Mais qui connaît plus tôt son propre crépuscule…

 

18.VIII.2024

18/08/2024, 21:51 | Lien permanent | Commentaires (0)

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