Journal du 12.IX.2024 : HORTVS ADONIDIS

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(Journal du 12.IX.2024) L’écrivain que je m’efforce d’être ne cautionne pas complètement l’argumentation que je développe pour la défense de mes intérêts dans l’affaire qui m’oppose au rectorat d’Acaris. Cette argumentation montre un Antire bien tiède en comparaison de l’auteur du petit texte posté sur Facebook en octobre 2021 et qui avait fini par entraîner mon licenciement. Oui, certes, mon texte avait été mal lu, mal compris. Mais surtout, non ! Les enfants ne sont pas moins des veaux que leurs parents ! Ils sont même devenus le veau d’or. Il faut abattre cette idole obscène, qui est une insulte à l’humanité, dont le culte ne s’aurait être un hommage à la puérilité. « Peut-on séparer l’homme de l’artiste ? » La question revient régulièrement dans les débats qu’on sert à tous ces gens qui veulent des réponses ; qui croient que c’est de réponses que manque l’homme… Mon premier mouvement est souvent de me dire que, pour ma part, j’arrive très bien à séparer l’homme de mon coiffeur, du moment que la coupe de cheveux me paraît bien réalisée. Et pourtant, il n’est pas rare que sa conversation me dérange : elle m’empêche, le plus souvent, de m’indigner autant que je voudrais devant l’épouvantable spectacle que me renvoie le miroir. Mais il est vrai qu’il peut y avoir cette différence, entre l’homme et l’écrivain, que le premier n’a pas toujours le courage dont le second lui demande de faire preuve… La page est le lieu d’une liberté trop odieuse au commun des mortels pour que celui-ci ne veuille pas la mettre au feu, et son auteur avec. Mais tout le monde n’a pas la fermeté d’un Giordano Bruno devant le crépitement du bûcher, même si celui-ci n’a pas de flammes réelles ; et, d’ailleurs, pour combien de temps encore ? La page n’est pas de ce monde, du moins n’est-elle pas du monde tel qu’on croit qu’il est ou qu’il va. Ce qui s’y écrit fait parfois trop voir que le monde tourne autrement, et menace donc dangereusement cet autre géocentrisme tout paradoxal : celui des égos, de l’opinion dominante, du ‘‘narratif’’, comme ils disent. Mais justement, il s’est tant écrit de ces pages ou, du moins, certaines de ces pages sont d’une si grande portée, qu’on pourrait en recouvrir entièrement le ciel : c’est qu’il arrive au monde de changer sous l’influence d’une telle page, comme les destins sous celle des astres. Mais alors… quand les choses tournent mal, que le monde regimbe à la lecture d’une telle page et sent que mille autres vont être tournées d’un coup, ou même seulement qu’un simple retour à la ligne s’annonce, ou qu’une seule phrase lui a déplu, l’auteur peut-il sérieusement se défendre en répondant : « Ça n’est pas moi ! C’est l’autre ! Ce mauvais génie qui me force à écrire ! » ? On sait que des mots peuvent tuer, souffler le gaz dans les poumons, ficher des balles dans les chairs, comme le style d’Adrien, dans un mouvement d’humeur, peut s’enfoncer dans l’œil d’un esclave. Il peut y avoir chez l’écrivain cette lâcheté des grands dignitaires que l’emballement de régimes devenus fous finit par transformer en criminels de masse. Que l’écrivain soit un lâche, c’est humain. Mais à quoi servirait-il qu’il écrive, s’il ne trempait pas sa plume dans les chairs du monde, s’il ne faisait pas un peu gicler tout cela ? Avant d’en être une pour l’auteur, le travail de la littérature n’est-il pas censé être la torture des lecteurs ? Comme le client, le lecteur est roi, c’est entendu. Mais l’écrivain est un fou. C’est le fou du roi. Dans un monde idéal, le statut de ce nain au verbe haut devrait le protéger par principe, quelle que soit la teneur de ses saillies. Mais même un fou a des mains pour tuer… Il n’y a pas de réponse à la question. En donner une ne ferait qu’ajouter au tragique. À tout le moins aux mensonges qu’on se fait.

 

12.IX.2024

12/09/2024, 23:52 | Lien permanent | Commentaires (0)

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